A l’issue de sa mission sur les dangereuses terres amazones, le général des forces septentrionales, Marmaduk, revint faire son rapport à l’empereur Merodach. L’immense ville de Babylone s’était encore agrandie durant son absence. Les terres agricoles drainées gagnaient encore de la place sur le désert tandis que les manufactures et les artisans travaillaient jour et nuit pour équiper la gigantesque armée némérienne.
Lorsqu’il entra dans le monumental palais impérial, Marmaduk constata que la décadence avait atteint toutes les couches de l’empire. Ce palais n’était plus qu’un repaire d’orgies, de courtisanes avides, de nobles désireux de torturer des esclaves pour leur seul plaisir, et de soldats impatients de tuer les ennemis de l’empire (après avoir violé leurs femmes et égorgé leurs enfants, sans compter les moutons et les petits chiens). La cour de Merodach était encore plus extravagante que jamais, l’alcool et le sang y coulaient à flot. Lorsqu’il fut devant le trône impérial, bâti en crânes humains, Marmaduk s’agenouilla en touchant trois fois le sol de son front.
« Parle, déjection canine ! hurla l’empereur, fais-moi ton rapport sur ton échec avant que je t’extirpe les entrailles par le fondement ! »
« Mon empereur, mille ans de règne pour vous, que Marduk le Dieu des Dieux vous accorde gloire et richesse, articula Marmaduk, ma mission a été couronné de succès. J’ai avec moi un écrit de la Reine Letha, nouvelle souveraine des Amazones, qui nous assure de l’arrêt des vols de nourrissons à nos frontières. J’ai mis en déroute les Spartiates grâce aux Immortels. Les Amazones nous soutiennent ainsi que ce peuple étrange que l’on nomme Maya et qui viendrait de par-delà l’océan. »
« Comment oses-tu, assemblage d’immondices putréfiés, prétendre que ta mission est une réussite ? Mes espions m’affirment que les raids ont repris de plus belle contre nos villages frontaliers. De plus, je sais que nous avons été humiliés par les Hellènes, qui ont battu sur leur navire les hommes que tu commandais. Quant à ces prétendus alliés, je n’en ai que faire, nous n’avons besoin de l’aide d’aucun de ces faibles peuples ! »
« Mon empereur, mille ans de règne pour vous, que Marduk le Dieu des Dieux vous accorde gloire et richesse, ces raids sont dus à quelques Amazones dissidentes. De surcroit… »
« Silence, phacochère impuissant ! Tu mériterais que je te crucifie au sommet de mon palais, en laissant les vautours te fienter dessus ! Tu as de la chance d’être le fils de ma sœur, cela sauve ta vie ! Remet moi d’abord le sabre que je t’ai confié ; tu déshonores le Dieu Gilgamesh en le portant ! »
Tandis que Marmaduk, tremblant de peur et de colère, posait son sabre au sol en maugréant des excuses, l’empereur s’adressa au fils de sa concubine, Ckaldéar Ur-Nammu, lieutenant dans l’armée :
« Ckaldéar, prends donc ce sabre et estropie cet incapable ! »
Le jeune et arrogant Ckaldéar remercia vivement l’empereur puis s’éxécuta. Il donna un vigoureux coup sur la cuisse de Marmaduk qui chuta en serrant les dents pour contenir sa douleur.
« Ckaldéar Ur-Nammu, continua l’empereur, je te nomme général des forces septentrionales. Marmaduk, tu ne seras plus que lieutenant, tes terres seront brûlées et expropriées ; ta femme et tes enfants te seront servis comme repas. Remercie ton empereur de sa bonté infinie car je t’accorde la vie sauve. J’ai dit »
C’est ainsi que Ckaldéar, fils de la première concubine de l’empereur, devint le plus jeune général de toute l’histoire de la Mésopotamie.
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